Réaction à ton texte sur la place de la
femme kabyle.
Il nous faut arrêter de peindre en permanece le diable sur la
muraille. La place des femmes en kabylie est ni plus ni moins ce qu'elle
a toujours été dans les civilisations méditéraméennes
et résumer cette place au rites du mariage me parait un peu réducteur.
Enfermés dans nos montagnes le changement est un peu plus long,
mais il n'est pas inutile de rappller le rôle social des femmes,
leur courage et leur participation durant la guerre d'Algérie
qu'aucun homme ne peut leur nier et ce n'était ni première
fois dans l'histoire ni la dernière.
Aujourd'hui j'assume un rôle politique important dans un pays
d'Europe et je dois dire que je tire mes forces des traditions kabyles
de dérrision, d'humour et d'imagination qui m'ont été
transmises par les femmes qui ont ont guidé mon enfance, ma grand
mère qui très jeune s'est retrouvée seule avec
ses filles et qui assumée de manière remarquable cette
responsabilité, ma mère qui même si elle ne sait
ni lire ni écrire trouve toujours les mots justes à toutes
les situations ambarrassantes que je lui expose et qui malgré
la douleur de l'exile à su me faire aimer être une femme
et m'a enseigner le pouvoir. Pas celui des hommes, celui bien plus subtile
et solide des femmes...le rire et ma tante qui m'a raconté l'horreur
des guerres et la nécessité d'y mettre fin tout cela sans
théories fumeuses, sans discours grandiloquants, tous cela dans
la cuisine en faisant des gateaux. Ce que je sais du monde c'est elles
qui me l'ont enseigné et la culture et le savoir que j'ai acquis
à l'école, au lycée ou à l'université
n'est venu qu'en appui à un autre savoir que j'avais déjà
intégré.
Je ne pourrais pas mener les combats qui sont les miens sans la culture
du bon sens, sans la ténacité et la droiture du sang kabylie
qui coule dans mes veines, et si parfois je me sens piégée,
il me suffit de repenser à là d'où je viens pour
reprendre immédiatement des forces. Ne nous trompons pas les
hommes kabyles parlent bien, mais femmes kabyles agissent et leur pragmatisme
leur donne une capacité d'analyse que leur envieraient les hommes
s'ils regardaient autre chose que leur entre-jambe.
Le monde change et la Kabylie aussi, pouvoir se marier avec qui bon
nous semble est un premier pas, mais cela revient à choisir son
maître... Je ne crois pas que c'est ce que veulent les femmes,
la chose qui effectivement les libérera c'est le savoir. Pour
conclure je te citerais une anecdote, quand j'avais 12 ans j'ai demandé
à mon père qu'il m'enseigne le kabyle, il m'a répondu
"pour l'instant apprends l'anglais, il sera toujours temps d'apprendre
le Kabyle quand nous dominerons le monde..." Nous en rions encore,
je ne parle toujours pas kabyle et pourtant je parle 6 langues.